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Bonjour, bonsoir,

 

Je vais aborder ce classique d'amour fameux des années 1980, d'une auteure vietnamienne. Je ne suis pas très porté sur les romans d'amour, celui-là est une exception. Ce roman dépeint à mes yeux une relation de couple qui dérape solide et ou les illusions se succède aux brèves lueurs d'espoir. Un bijou de littérature, un récit ou la poésie et les émotions brutes nous saisissent, et ou des vérités toutes crues émergent par moments de façon forte comme des phares au milieu de la route d'un navire en la tempête.

J'ai divisé le roman en neufs thèmes et en aborderais quatre en ce premier article et cinq en le prochain. À la fin de l'article, je vous propose un commentaire sur ce que quelqu'un d'autres à dit sur ce roman exceptionnel, par Mina Merteuil= son pseudonyme.

 

T1. Les conflits dans le couple Linh/ Nguyên; du surtout aux: jugements expéditifs/ manque de communication/ perceptions et autres;

  • Linh l'idéaliste/ lui...un réaliste et ce qui s'ensuit est un enchaînement: d'incompréhension, de mépris et de conséquences tristes pour la famille, en page 39:

« La femme regarde son mari. Il allume une cigarette, le front marqué de petites rides profondes...un homme qui vit vraiment pour son travail? Mais à quoi sert ce travail? Linh sent de nouveau la rage l'étrangler au souvenir des articles mensongers qu'il a publiés. Nguyên est intelligent, mais il n'a pas le courage vivre ses convictions.»

 

  • Perceptions de l'un envers l'autre...puis les déchirements arrivent...en page 17 &18. Il lui dit:

«Je dis la vérité. Je t'aime, je veux te chérir. Mais tu es restée une collégienne, tu n'acceptes aucune autre réalité que celle que tu imagines dans l'encre violette, tu ne pardonnes aucune exception. Tu es naïve comme une enfant et têtue comme une reine. C'est pour cela que je t'ai tout caché...»

-Elle: -La réalité de tes mensonges?

-Il y a deux réalités, la réalité nue de la vie et la réalité des aspirations humaines.»

 

T2. Le pouvoir du regard de l'autre sur l'individu ainsi que celui de la communauté et des pressions sociales; l'histoire se passe en une ambiance socialiste.

  • La patronne de Linh, directrice d'école; doutant du bien-fondé d'une décision défavorable envers Linh( son employée, laquelle s'est séparé de Nguyên); en p. 188, ses pensées la tiraille:

Serais-je lâche? Je n'ai pas été capable de défendre une femme qui a l'estime de toute la collectivité. Entre la peur des pressions de la société et la foi en soi-même, ou est le lieu du courage?»

 

  • Malaise entre Nguyên et son patron, alors qu'il lui a confié d'écrire un article mensonger pour défendre un monstre du Pouvoir, page 280& 282 échange dans le bureau:

«Le rédacteur en chef lâche soudain un long soupir, secouant sa chevelure:

-Ah oui, ah oui, mais chez nous, comme tout est compliqué, difficile. Nguyên se sent brusquement étouffer. Il ne supporte plus cette atmosphère d'hypocrisie qu'il qualifiait d'ordinaire de travers social et dont il se désintéressait...

Par la suite, Nguyên lui balance son argument-matraque:

-Merci pour votre confiance. Mais je voudrais vous poser une question: N'avez vous jamais pensé que la confiance de certains nous valorise alors que celle d'autres nous déshonore et nous réduit à l'état de serf?

Le rédacteur en chef cligne des yeux, visiblement embarrassé.

 

 

T3. Ce qui touche au thème de la Beauté dans le récit:

  • quand ta beauté s'en va...ensuite?page 192:

« Dans une demi-heure, après avoir déployé son art consommé du maquillage, elle pourrait encore tromper des hommes à vingt mètres de distance. Mais elle ne pourra pas se tromper elle-même et cela l'effraie plus que tout. Elle ne pourra plus faire confiance à sa beauté, elle a perdu la dernière arme dont elle dispose dans la vie.»

  • d'aventure en aventure...un homme déchiré, page 295:

« Le ciel se mirait dans ses splendides yeux marron. Linh, était-elle belle à ce point? Il avait rencontré des milliers de femmes. Des actrices resplendissantes dans leurs costumes chamarrées, de jeunes travailleuses manuelles débordantes de santé, de naturel, juteuses comme des fruits murs. La beauté, dans sa diversité, il l'avait connue, mais il n'aimait que Linh.»

 

 

T4. Pouvoir de séduire: tout art à ses limites! Ouais, même ces Don Juan, beaux, cajoleurs et flamboyants...se font piégé tôt ou tard en leurs mensonges, Ah!ah!ah! :

 

  • Trn Phuong, le Don Juan de Linh...comment dire, va pas bien, ouch! Ayoye! pas ben pantoute1! sa femme exige des explications, p. 151:

« La femme hurle par habitude. Depuis longtemps, chaque fois qu'elle hurle, l'homme se fait accommodant, il s'explique, il la console, lui redonne confiance en elle-même.

-LUI: -suppose que je pense à une femme jeune et belle.

ELLE: -Tu n'as pas le droit...tu n'as pas le droit...

Trân repousse froidement la main de sa femme...d'une voix lente, détachée:

-Il n'y a aucune loi qui garantisse l'amour d'un homme pour une femme. Seule la séduction maintient l'amour. Tant qu'on reste capable de séduire, on sera aimé...»

  • Couple coloré, mais mal assorti; Ngoc Minh et Nguyên, p. 216-217:

«Sa voix douce, attentive, spontanée était celle d'une femme appelant son mari. Nguyên la regarda, il se surprit à hésiter:

- Pourquoi? Pourquoi? Il tourna en rond dans la chambre, incapable de s'expliquer le doute qui s'emparait de lui. L'oiseau à son nid, le renard, son terrier, l'homme doit avoir son propre toit. Les oiseaux ne peuvent pas vivre dans des terriers. Je ne pourrais pas vivre sous le toit de Ngoc Minh.»

 

 

1 pantoute  : expression québécois qui veut dire être dans un grand trouble

Avant d’être un roman «philosophique», Au-delà des illusions est surtout une belle histoire d’apprentissage: celui de Linh, si intransigeante avec elle-même et avec les autres quant à la question des valeurs. Confrontée à la trahison et à la lâcheté, il lui faudra ouvrir les yeux pour aller au-delà de ses illusions. Son mari, Nguyên, aura lui aussi à prendre conscience de l’homme qu’il est devenu et de celui qu’il veut être. Nul ne reste égal à lui-même pendant le temps du récit. Comme les saisons – parfois évoquées par de petits détails contemplatifs: la couleur des feuilles ou du ciel, la présence des fleurs odorantes, entre autres –, les hommes changent et suscitent d’autant plus l’empathie du lecteur.

 

Un très beau roman, qui pose des questions intéressantes.

 

Lien: http://monsalonlitteraire.blogspot.com/2014/07/au-delà-des-illusions-duong-thu-huong.html

 

 

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 Il y a aussi la reprise du classique de Pierre Bordage «Les guerriers du Silence»; cycle 1 seulement que j’ai lu, laquelle a été remouler à la manière de P. Ogaki pour faire une série de quatre tomes. Hélas, le rythme est à mon avis trop rapide, mais comme l’œuvre de Bordage contenait plus de 1800 pages… y’a pas le choix de défilé à vitesse… grand V. Un formidable effort de synthèse a été fait, je l’accorde.

Le seul point un peu faible est qu’on a surexploité les séquences d’actions, à la mode hollywoodienne, alors qu’à mon avis, les auteurs auraient pu rehausser via les dialogues le côté résolument philosophique du roman; ce qui m’a frappé entre autres est ces deux points à :

 

  • Des dérives d’une religion totalitaire associée à un régime politique mégalomane et assoiffé tellement de contraindre les divergents; ça ressemble étrangement au style de pensée unique que les médias et gouvernements nous proposent depuis le début de la crise du Covid-19 de la depuis mars 2020…

  • Secundo, du rôle important que peut jouer une personne ordinaire, en l’occurrence Tixy Otty, héros majeur des «Guerriers du Silence1», homme à la vie morne, qui noie son ennui dans l’alcool, l’indifférence à soi-même et aux autres, se complaisant en une existence médiocre. Celui-ci devient graduellement un héros extraordinaire, pas dû à ces mérites seuls, mais surtout en s’entourant d’une équipe avec lui, et grâce à l’appui de sa partenaire de vie.

 

Bref, que vous lisiez le roman ou les BD, chaque version d’un ou des récits vous apportera de beaux moments de plaisir et de réflexion.

 

 

 

Cordialement, El Griffon